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Les rencontres nationales de la participation 2018


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Les Rencontres nationales de la participation propulsées du 6 au 8 mars à Marcq-en-Baroeul par le think tank Décider Ensemble sont une vraie réussite : 700 participants, un foisonnement d’enthousiasmes et une diversité d’ateliers qui laissent rêveur. D’où vient pourtant cette minuscule amertume qui stagne dans l’air printanier comme un pollen moqueur ? Comment entendre cette sensation d’inachevé qui partage la vedette avec la satisfaction d’avoir partagé un “moment” d’intelligence collective ?


intervenants durant les rencontres natioanles de la participation de 2018

La dispersion mentale est sans doute une première piste. Dans la profusion de temps de cerveaux disponibles, il sera bien difficile de percevoir un fil conducteur, une direction générale, un motif : il fallait savoir jongler avec la formation aux réunions publiques, la co-construction d’une enquête publique, le débat sur les marchés publics, le témoignage de garants, les expérimentations à l’étranger, la participation en santé, les communs, les chartes, la planification, les centres sociaux, les plateformes, les PLU, les budgets participatifs, la concertation en milieu rural, les jeunes…


Nous misons ici également sur une seconde possibilité : le manque de perspective et de perspectives. Si les Rencontres ont, cette année encore, dressé un panorama fantastique des moyens (humains, techniques, intellectuels) à disposition de la participation citoyenne, on aura encore du mal à cerner l’après. Dépasser les constats et les diagnostics. En somme, passer à l’action et produire de l’impact. Car la démocratie participative, ce ne sont pas les Jeux Olympiques : participer ne suffit pas. Il est donc nécessaire que tous les acteurs soient là, à commencer par les décideurs.


Le doute


Malgré la richesse des échanges qui se sont matérialisés au long des trois jours, malgré la mobilisation sincère de quelques élus de Clermont-Ferrand, de Mulhouse, de Nantes, de Grenoble, de Lyon, de Créteil et d’ailleurs, la matière première du questionnement a bien trouvé refuge durant les grandes messes d’ouverture et de clôture de l’évènement. Au point qu’on pourrait sans doute résumer l’évènement à ces deux tables rondes, et même principalement aux aphorismes d’un habitué du genre : Loïc Blondiaux, professeur à la Sorbonne et sociologue référent sur les questions de participation.


« La démocratie participative c’est la condition de la survie de nos démocraties », « les politiques sont la clé de toute démarche participative », « les citoyens doivent être convaincus d’être égaux vis-à-vis des élus », « il faut repenser le leadership, l’élection n’est plus suffisante », « les décisions ne peuvent plus se prendre en vase clos entre experts et décideurs »… — derrière la prédication, point un message fort : repenser les règles et associer les citoyens à la décision publique. Ce qui implique un changement de posture du politique, des élus, des décideurs et surtout une refonte des processus de décisions.


Or, si Blondiaux, un brin moqueur, s’est félicité de la présence d’élus à une table ronde intitulée « Peut-on encore intéresser les citoyens à la vie publique ? » on a envie de l’accompagner dans son cheminement de pensée : peut-on encore intéresser les politiques à la vie publique ? « Former les élus aux techniques de participation, ce sont des choses simples. Comme apprendre qu’il ne faut pas prendre la parole cinq fois plus longtemps que les autres » commente-t-il, goguenard, devant une salle bondée et disposée à sourire.


Plus sérieusement, les élus sont bien présents, bien que rares. A l’image de Pauline Véron, adjointe en charge de la démocratie locale et de la participation citoyenne à Paris, qui n’hésite pas à provoquer en se demandant pourquoi on parle « d’innovation démocratique » en décrivant les fondamentaux, à savoir le dialogue entre des élus et des citoyens. Et de renchérir : « la verticalité de notre société est une des causes à la non formation des élus à la concertation et à la participation citoyenne ». Mais la verticalité a bon dos, et Blondiaux prévient : « la démocratie participative n’est pas seulement une question de règles, de textes, mais une question de culture, de pratique. »


L’espoir


Et pourtant, comme le rappelle Raymond Vall, sénateur du Gers : « les textes prévoient déjà l’innovation démocratique, ce qui est compliqué c’est la mise en oeuvre ». Dans la salle, l’ambiance se réchauffe. Armel Le Coz, du collectif Démocratie Ouverte, questionne depuis le 15e rang : « quel budget les élus dédient-ils à la Recherche & Développement pour l’innovation démocratique ? La démocratie ce n’est pas gratuit ! » On sent bien que le nerf de la guerre s’approche à grand pas.


« Les outils de la participation existent mais il faut que le politique s’engage et respecte l’expression citoyenne. Mieux vaut ne pas concerter que concerter et ne pas tenir compte des citoyens, sinon gare au populisme » intervient Bertrand Pancher, député de la Meuse et président de Décider Ensemble.


Dans une salle attenante, nous apprenons que 38 à 42% des municipalités portugaises déploient des budgets participatifs. Que l’Etat (etalab) s’est rendu compte qu’il n’y avait « pas tant de trolls et de spam » finalement sur ses plateformes de participation. Qu’au Québec « on crée des conditions d’éveil d’une conscience participative » en acceptant de faire passer tant les petits projets que les politiques publiques « dans le prisme du dialogue citoyen ». Et à l’atelier « Rapport au pouvoir, changement de posture », trois élus seulement sur 70 participants.


« Partout où la participation citoyenne fonctionne bien, il y a un leader fort et impliqué » conclut Blondiaux. Nous voyons les effets que peuvent produire cette implication : Rennes, Mulhouse, Orléans, Montreuil, Grenoble — et dès 2015 la co-construction du projet de loi République Numérique — sont les témoins qu’un portage politique puissant est la porte ouverte à la participation des citoyens à l’élaboration des politiques publiques.


“Les outils existent mais il faut que le politique s’engage et respecte l’expression citoyenne”. La messe est dite et elle est envoyée par l’organisateur de la fête. Nous savons, nous pouvons. Reste à savoir si nous voulons.


Les Tops de Cap Collectif

  1. Marcq-en-Baroeul : quand on a du descendre les volets dans l’atelier sur le budget participatif, et que Grenoble s’est plaint d’être ébloui par le soleil du Nord !

  2. Les paroles simples de l’élue de Sailly-les-Lannoy qui rappellent que la participation reste libre et que son but n’est pas de forcer des gens (qui ne lui ont rien demandé) à s’investir !

  3. La démonstration live de trolling pendant la plénière d’ouverture : on met ça sur le dos du numérique ou de la frivolité de l’assistance, plutôt que de voir l’évidence : on a proposé au public de poser des questions sans prévoir que le public attendrait une réponse !

Les Flops de Cap Collectif

  1. Le Musée des Beaux Arts où il n‘y avait aucune sculpture de Dany Boon.

  2. Les faux débats sur le numérique où on ne cesse d’opposer le présentiel et le numérique tout en commençant ses phrases par une ode à leur complémentarité.

  3. Le manque de nouvelles têtes dans les intervenants en plénière : dans les 700 participants, il y avait forcément des gens moins habitués des plateaux mais tout aussi intéressants.

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